Un orgue musette
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Cette fois-ci ce sera un orgue à anches qui si possible, procurera naturellement ce son musette que les possesseurs de e.serinettes en particulier ont souvent peine à retrouver derrière leurs divers synthés.

Le cahier des charges peut brièvement s'énoncer comme suit :
- Ce sera un 29 notes avec de vraies anches et une soufflerie travaillant en dépression pour que ce soit plus simple.
- Et puis pour faire plus simple encore, la commande sera purement électronique avec en tout et pour tout un seul module PPCaP.

Mais l'instrument n'en est pas pour autant simple à construire ! Les difficultés sont nombreuses et se cachent souvent là où on ne les attend pas. Cette page décrit un instrument qui fonctionne plutôt bien, mais je ne garantis en rien qu'il soit facilement reproductible.

Voici donc comme d'habitude la description des différentes étapes de cette construction dans l'ordre dans lequel je les ai réalisées.


Les anches

Cela faisait pas mal d'années que cet accordéon ayant appartenu à mon père était là sous une table, en morceaux dans une caisse. Trop abimé pour être restauré, il constituera une bonne source de matière. Les musiques ont été démontées et les anches soigneusement nettoyées.
Et puis le visionnage de cette vidéo m'a un peu décomplexé quant à la difficulté de travailler les anches. Quand on a bien compris la finalité de chacun des gestes de ce fabricant, on se rend compte qu'il n'est guère plus difficile d'assembler une anche, de l'ajuster et de la faire sonner juste que de réaliser une flûte.

Donc :
- Les anches ont été coupées pour ne conserver qu'une lamelle.
Suggestion de mode opératoire : On serre la partie perdue de l'anche dans un étau, plutôt modérément afin de ne pas déformer le cadre. Ensuite on procède à la découpe à l'aide d'une scie à métaux ordinaire en s'alignant contre le le bord interne de la lumière de l'anche sacrifiée.

Principe de la découpe d'une anche double

Ensuite :
- On va constituer 2 jeux d'anches complets en 29 notes, allant du Do2 (131 Hz) au C5 (1175 Hz).
- L'un des jeux sera accordé juste tandis que l'autre le sera 5 Hz au-dessus de manière à obtenir le fameux effet musette.
- Cet accord est effectué à priori, avant montage sur l'orgue et sera affiné une fois l'instrument terminé.

 

Marquage point noir : accord juste, point rouge : 5 Hz au-dessus

Elles sont fixées au moyen de cette cire spéciale, mélange de cire d'abeille et de colophane, que l'on trouve chez les facteurs d'accordéons.

Le sommier

En fait tout est là. Posé sur une boite à vent en dépression et raccordé à une carte PPCaP, "l'orgue" fonctionne déjà.

Le sommier prêt à fonctionner avec sa nappe de raccordement

Le point de départ ce sont les relais. Je ne voulais pas utiliser les valves traditionnelles de type Peterson car elles prennent pas mal de place et sont difficiles à approvisionner (à un prix raisonnable s'entend). J'ai donc utilisé un simple électro-aimant à noyau mobile.

La résistance de la bobine doit être au moins de 50 Ohms de manière à la commander directement par un ULN2803 sous 12 à 14 V sans interposition d'un ampli et la force devra être suffisante pour lever un clapet fermé par un ressort s'opposant à une dépression de l'ordre de 8 cm CE.

Les mesures effectuées sur une maquette d'essai ont montré que l'on avait besoin de l'ordre de 50 gF au point d'application à l'instant du décollement suivit d'une course d'environ 2.5 mm. L'ouverture est alors suffisante pour que 2 anches de basses jouent pleinement.

Avec leur bobine de 50 Ohms et 70 gF d'attraction, ce sont ces relais qui ont été retenus.

 

Côté aigues à gauche et basses à droite. Noter la différence de longueur de chambre

Le principe de ce sommier est montré dans les croquis suivant. La disposition en quinconce permet réaliser un instrument compact avec une distance minimale de 11.5 mm entre rangées d'anches en utilisant des relais de 15 mm de largeur.

Attention : Les cotes qui sont reportées sur ce dessin sont adaptées au jeu d'anches que j'ai utilisé. Pour d'autres d'anches, il sera indispensable de tout vérifier et vraisemblablement d'adapter le dessin.

Croquis coté du sommier en pdf

 

Ressorts et clapets

Les chambres ont toutes la même section. Seules leurs longueurs diffèrent et sont respectivement égales à la longueur du cadre de l'anche concernée.

Remarque : Les 2 anches doivent être indépendantes : Chacune sa cavité et son trou de commande. Si on met une cavité commune et un seul trou de commande, on obtient un battement entre les 2 anches qui semble dépendant du volume de cette cavité et non de leur différence d'accord.

 

La soufflerie

Un système à 3 soufflets constitue un minimum pour obtenir une production d'air continue. Pour le coup, je me suis largement inspiré de ce qui se faisait autrefois dans les Celestina, tant pour la disposition, que pour les volumes, car bien malin qui pourrait prédire la consommation en air d'un jeu d'anches sans procéder à bon nombre d'essais. Il m'a donc semblé plus simple de construire avec des dimensions usuelles pour constater ce que ça donne sur l'instrument complet. En cas d'insuffisance d'air, il aurait alors été plus facile de la quantifier et d'y remédier avec certitude. Mais cela n'a pas été nécessaire ;o)

La construction est toute simple : 3 soufflets identiques vissés sur la réserve. Les clapets sont situés à l'extérieur des poches et tout est démontable.

Les dimensions principales sont les suivantes :
- Soufflet : 110 mm x 180 mm. Débattement prévu : 60 mm.
- Réserve : 330 mm x 180 mm. Débattement max : 110 mm. Ouverture du clapet à 60 mm.
- La dépression est de -8 cm CE. Elle est procurée par 2 ressorts latéraux en corde à piano de 2.5 mm.

La soufflerie forme un seul bloc qui est assemblé au moyen de 4 vis contre la boite à vent avec interposition d'un joint en peau.

   

Les bielles sont en résine

    

Croquis coté de la soufflerie et dessin des éclisses en pdf

Et puis ça faisait un bon moment que je rêvais de fabriquer un vilebrequin monobloc, à l'ancienne quoi. Là non plus ce n'est pas forcément facile car il a fallut réaliser une cintreuse spécifique, assez rustique certes, mais indispensable si on veut un résultat correct. Le formage a été effectué à froid et puis tant qu'à être parti à plier une barre de ferraille, on fait 2 coudes supplémentaires et on obtient la manivelle. Simple non ?

Les gorges pour les circlips ont été effectuées à la lime

Ce n'est pas absolument parfait, mais ça me plait bien. Bon, il va de soi qu'un vilebrequin soudé conviendrait tout autant. La barre d'acier est du rond de 6 mm et la longueur des manetons est de 30 mm entre axes.

 

Cotes de la cintreuse à vilebrequin et cintrage du 3ème coude

Le coffret

Léger et ajusté au plus près du cœur de l'instrument. Bah oui on ne se refait pas, je n'aime pas les espaces inoccupés. Tout est en contreplaqué de 4 mm (merci à Jean-Claude -JCA) assemblé par collage sur des tasseaux en pin. Et puis comme ce contreplaqué n'est pas moche, il a simplement été vernis et les chants traités avec un peu de peinture, étalée avec le doigt...

 

Léger et solide

   

Les clips en alu marron maintiennent la nappe de commande des relais

Habituellement dans les instruments à anches, ces dernières sont cachées derrière une grille, du tissus etc... Là j'ai souhaité les montrer car je pense que l'amplitude du débattement des lamelles est assez intéressante à visionner et peut même surprendre. Et puis, pour une fois que quelque chose bouge pendant qu'un orgue joue, autant le montrer !
La face avant est donc en plexiglas de 3 mm, ajouré pour laisser passer le son. Le motif a été découpé et gravé au laser par un autre Jean-Claude (les orgues quimpérois) à qui j'adresse un grand merci pour sa disponibilité et sa diligence sur cette opération.

Ne cherchez pas, cela ne correspond à aucun morceau de musique...

Le système de commande

Il y a exactement la place pour une carte PPCaP et une batterie constituée d'une série de 4 paires d'éléments 18650 (assemblage de type "4S"). La tension obtenue est donc de 14.4V et la capacité de 3.6 Ah.
La batterie a été obtenue par réassemblage des éléments d'une batterie de récupération à la forme différente procurée gracieusement par Christian D à qui j'adresse un grand merci.
Attention à bien savoir ce que vous faites si vous effectuez ce type d'opération !
1. C'est très facile de faire des court-circuit au moment du remontage et les éléments Li-Ion n'aiment pas du tout. Du tout, du tout.
2. On peut flinguer la carte BMS simplement en ne respectant pas la séquence de soudage des éléments qui doit impérativement être : en premier la masse, puis positif du premier accu B1, puis B2, puis B3 et B4 en dernier (ordre inverse pour le démontage).

A défaut de gaine thermo, le réassemblage est effectué au "duct tape" armé

 

Et bien sûr, synchronisable en radio comme (et avec) toute la famille PPCaP

Le capteur de vitesse est fait maison et situé en bout de vilebrequin. Le disque strié comporte 80 raies sur un diamètre de 40 mm imprimé à l'imprimante laser sur du transparent à rétroprojection. On en dispose deux encre contre encre pour augmenter l'opacité des raies. La fourche optique est une LTH301-07 (Gotronic) polarisée avec 11 K sur le transistor et 330 Ohms sur la led.

 

Simple et économique


On raccorde la nappe de commande, quelques bouts de fils supplémentaires vers le bouton, les leds, le capteur de vitesse et hop, musique au rythme de la manivelle comme avec un carton.

Les dimensions finales sont : largeur 37 cm, hauteur 27.5 cm, profondeur 21 cm, pour un poids de 5.1 kg. Joli bébé non ? ;o)

En avant la musique

Musique

Voici quelques extraits de morceaux qui lui vont bien.

Et... dans la pure tradition, on tire un trait.

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